En page 19 de son ouvrage Partir pour la Grèce François Hartog écrit :
« Dans Europe, la voie romaine, Rémi Brague a eu raison de rappeler que « les Européens ne sont en rien les héritiers de l’Antiquité ». Avec aussitôt ce correctif. « Ils ne le sont pas s’il faut entendre par « héritier », comme, dans la plupart des cas, quelqu’un qui s’est donné « la peine de naître » et qui a reçu dans son berceau les biens, matériels ou culturels, que ses parents lui ont laissés. Ils le sont, en revanche, si l’on conçoit le fait d’hériter comme n’étant rien d’autre qu’une activité d’appropriation. » Souligner la distance originelle ou l’altérité initiale de l’Antiquité est salutaire, et nous débarrasse d’un coup de propos convenus sur les racines ceci ou cela de l’Europe ou sur la Grèce, fille aînée de l’Europe. Comment s’est déployée cette activité d’appropriation ? Quel dynamisme l’a portée ? Quels en ont été les grands opérateurs au cours des siècles ? Qu’en est-il aujourd’hui ? Telles sont les questions qu’il convient maintenant de soulever. »
Ce que nous propose François Hartog dans sa conférence et les ateliers qui la suivront, c’est de comprendre comment s’est constitué au fil du temps un « objet Grèce » sans cesse remanié et réinvesti, « pour tenter d’approcher ce qui a rendu possible l’Europe et a peut-être constitué le ressort de sa singularité par rapport à Byzance, à l’Islam, ou aux civilisations asiatiques ».
Ce faisant c’est aussi sa singularité d’historien anthropologue qu’il nous révèlera en même temps que les clés de la mutation profonde du concept d’histoire, et partant du métier d’historien, survenue au cours du XXème siècle.
Dans Le Monde du 1er mars 2013, le philosophe Roger-Pol Droit dessine le portrait de l’homme et du chercheur que nous vous invitons à rencontrer ce dimanche 10 juillet à l’Espace culturel de Vaison-la-Romaine de 11h à 17h. « Depuis trente ans, il interroge sa discipline ainsi que notre rapport au passé et à l’avenir. Avec son nouvel essai Croire en l’histoire, cet intellectuel qui aurait pu être navigateur garde le cap. Il n’a jamais cherché à se mettre en avant, préférant que ses travaux parlent pour lui. Au fil des ans, leur pertinence et leur ampleur se sont révélées. L’homme a beau être discret, plutôt classe, avec son côté mi-taciturne mi-malicieux, il serait temps qu’on s’aperçoive que François Hartog est un des penseurs les plus originaux de notre époque.»