Vendredi 8 août : Bad Girl de Nancy Huston – Regard sur un portrait miroir
19H – Jardin Burrhus, allée du Couradou

Lecture-spectacle par la Cie Hadrien 2000

Extrait – p. 223 Babel
Un jour d’été, assise tranquillement à Paris Plage avec le Peintre pour écouter un petit orchestre brésilien, ton regard sera attiré par une adolescente : visage aux beaux traits réguliers, cheveux mi-longs et lisses, short en jean, grosses sandales, regard direct. Autant que par sa beauté androgyne, tu es fascinée par son attitude décontractée, ouverte et sans simagrées.
Hélas, après discussion avec le Peintre, tu seras obligée d’admettre que cette fille est un garçon. IMPOSSIBLE pour une fille, à quatorze ans, d’être à ce point à l’aise dans ses mouvements, à ce point indifférente aux regards sur son corps. Pourquoi ? Parce que son corps contient un utérus. Parce qu’il est le corps violable, le corps fécondable, le corps mystère, l’Origine du monde.
C’est cela la source de la coquetterie féminine, même si l’on fait tout – mais alors vraiment tout – pour l’oublier.

Vendredi 15 août : Affronter Houris de Kamel Daoud
19H – Jardin du Bon Ange, allée du Bon Ange

Lecture-spectacle par la Cie Hadrien 2000

Extrait – p. 53 Gallimard
Je te parle et je te parle, alors que je devrai me taire, prendre ma petite voiture et aller inspecter l’état de mon salon de coiffure pour me changer les idées. Oh oui j’en ai un, très fréquenté et qui me fait vivre. Depuis trois jours il est fermé, car mes deux apprenties sont rentrées chez elles. Durant cette semaine de l’Aïd, les femmes ne se coiffent pas et ne soignent pas leur corps. Elles se destinent aux cuisines et aux cuissons, au gras et aux entrailles des bêtes égorgées. Alors je n’attends pas de clientes. Et sans clientes, je libère les deux filles qui me détestent un peu, m’aiment un peu et m’imitent en se taisant en ma présence. J’en souris et ce sourire apparaît sincère, comparé à l’autre, sous mon cou, qui pétrifie les gens autour de moi comme du fil de fer bariolé. C’est la longue signature calligraphiée du meurtrier qui ne m’acheva pas faute de temps. Le fou rire du prophète qui voulut égorger son fils. Je te parle et je prolonge le délai dans ce beau ciel oranais, alors que je gagnerais à me taire et à te couper la tête une fois pour toutes. Avec trois pilules, ou des pinces froides, des sirops interdits, des coups de poing au ventre, en sautant à pieds joints pendant des heures, en avalant de l’acide, en chutant volontairement dans un escalier ou en mâchant des herbes bannies. Ne viens pas ici, dans ce pays, s’il te plaît !
Pars.